Lettre des objecteurs de croissance de Liège

Le 8 janvier 2017

mpOC-Liège
Mouvement politique des objecteurs de croissance
Groupe de Liège

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vous pouvez la consulter, de même que les lettres précédentes,
à l'adresse liege.decroissance.be/lettre/.

 

Bonjour,

Pour vous souhaiter une très bonne année 2017 et bien la commencer, le mpOC-Liège vous invite à ses deux prochaines activités : 
– Décroissance et éducation. Éduquer à la décroissance dès l’enfance ? sera le thème de notre prochaine conférence-débat qui aura lieu à l'Aquilone le vendredi 27 janvier. Pour nous en parler : Philippe Godard, essayiste, éditeur et pédagogue qui nous viendra de France.
– Le dimanche 19 février, ceux qui aiment marcher avec le mpOC-Liège retrouverons avec plaisir les magnifiques paysages de la Fagne wallonne.

Vous trouverez plus d'information sur ces activités et d'autres ci-dessous.

Sommaire

– Nos prochains dimanches conviviaux
– L'agenda du mpOC-Liège
– CETA, l'arnaque
– Obsolescence (Serge Latouche)
   

Nos prochains dimanches conviviaux

Dimanche 19 février 2017

Balade pédestre de la maison forestière de Ternell à Botrange par la vallée de la Helle et la Fagne wallonne (14 km).
Les balades sur le plateau des Hautes Fagnes sont toujours très appréciées, et pour cause, voir ces quelques photos prises lors d'une balade antérieure.

Points de rendez-vous pour le départ :
– Départ en train de la gare de Liège-Guillemins à 9 h 04 pour Eupen (comme d'habitude, RDV dans le dernier wagon).
– Devant la gare d'Eupen, bus à 10 h pour Ternell-Centre nature.
– Départ de la balade à 10 h 15 à Ternell.
– Autre possibilité : rejoindre le groupe en montant dans le train dans une des gares entre Liège à Verviers.

Retour par le bus Botrange-Verviers de 16 h 51. Arrivée à Verviers Central à 17 h 27. Trains pour Liège à 17 h 38 ou 18 h 05.

Recommandations d’usage : prévoir un piquenique et de bonnes chaussures.
Téléphone du jour : 0499 19 82 82.
 

L'agenda du mpOC-Liège

En gras les activités propres du mpOC-Liège ou celles auxquelles il contribue.

CETA, l'arnaque

Pour les peuples d'Europe et du Canada, s'il devait être ratifié par le Parlement européen et ensuite par tous les parlements des 28 États membres, le CETA constituerait un des événements politiques les plus terribles et les plus lourds de conséquence depuis la dernière guerre mondiale de 1940-45. Cet accord international est une attaque en règle contre ce qu'il reste de notre démocratie, contre les travailleurs, contre les peuples des pays concernés et contre la nature, au profit des seuls dirigeants des plus grandes entreprises de ce monde et de leurs valets en politique.

Le CETA n'est pas encore ratifié, et de loin. Il reste plusieurs opportunités de l'arrêter mais il importe de les mettre toutes à profit, à commencer par la première d'entre elles, la ratification par le Parlement début février : faisons pression sur nos députés européens qui vont devoir voter le traité. Posons leur la question clé : vous engagez-vous à voter contre le CETA ? L’association stop-ttip.org a mis en place pour ce faire le « CETA CHECK! », très facile à utiliser, rendez-vous sur cette page : https://stop-ttip.org/fr/cetacheck/

La monumentale arnaque du CETA

Pour vous aidez à donner du poids à votre argumentation contre le CETA, voici quelques extraits de la dernière analyse de l'Observatoire européen des lobbies (CEO) publiée en novembre 2016, La monumentale arnaque du CETA (CEO : Corporate Europe Observatory) :

De part et d’autre de l’Atlantique, le CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement ou Accord économique et commercial global, AECG) entre l’UE et le Canada soulève de nombreuses controverses. En Europe, 3,5 millions de personnes, un record en l’occurence, ont signé une pétition contre le CETA et son accord jumeau, le TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership ou Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement), appellé également TAFTA.

Les syndicats européens et canadiens, ainsi que les associations de consommateurs et les groupes actifs dans les domaines de la santé et de l’environnement, tout comme les petites et moyennes entreprises (PME), rejettent cet accord.

Des plaintes constitutionnelles ont été déposées contre le CETA en Allemagne et au Canada, et la compatibilité des privilèges controversés, que le CETA accorde aux investisseurs étrangers, avec la législation européenne sera vraisemblablement déterminée par la Cour de justice de l’Union européenne.

La controverse n’a pas épargné les gouvernements ni les parlements. En Europe, plus de 2.100 pouvoirs locaux et régionaux se sont déclarés « zones libres de TTIP/CETA », souvent dans le cadre de résolutions soutenues par plusieurs partis. Les parlements nationaux et régionaux ont aussi exprimé leurs craintes face au CETA, notamment la Belgique, la France, la Slovénie, le Luxembourg, l’Irlande et les Pays-bas. En octobre 2016, les inquiétudes de quatre autorités sous-fédérales belges (menées par la Wallonie) quant aux impacts négatifs de l’accord, et notamment les dangereux privilèges qu’il accorde aux investisseurs étrangers, ont failli faire obstacle à l’approbation de la signature du CETA par le gouvernement fédéral.

Blanchir le CETA, dénigrer les critiques

Au cours des derniers mois, afin de sauver le processus de ratification du CETA, les responsables canadiens et européens du commerce ont lancé une impressionnante machine de propagande. Ils affirment que le CETA constitue « un accord commercial très progressiste » (Cecilia Malmström, Commissaire européenne au Commerce) qui va « modeler la mondialisation » selon les principes du « commerce équitable » et dans le respect des intérêts des travailleurs (Frank-Walter Steinmeier, Ministre allemand chargé des affaires étrangères).

Les détracteurs de cet accord ont été comparés à des « voyous du commerce » (Donald Tusk, Président du Conseil européen) vivant dans une « réalité post-factuelle » (Tusk, ibid.), « qui alimente des craintes et des peurs n’ayant objectivement aucun rapport avec le texte du CETA » (Daniel Caspary et Elmar Brok, députés européens du groupe du Parti populaire européen).

Beaucoup de médias ont plaidé en faveur du CETA, arguant que « nombre de critiques, qui peuvent éventuellement être justifiées pour le TTIP/TAFTA, ne sauraient concerner le CETA » (Spiegel Online, site d’information allemand en ligne). Lorsque le gouvernement wallon, après 70 heures de consultations publiques sur le CETA au sein de son parlement, a retardé la ratification du CETA, les médias ont jugé que cette action « se fondait sur une opposition générale à la mondialisation qui jouait avant tout sur les émotions en négligeant les faits ».

Le Président de la Commission du commerce du Parlement européen, Bernd Lange, député européen membre du parti social-démocrate, a estimé que l’appel de la Wallonie à une renégociation du CETA représentait « un pas de plus vers la destruction de l’Union européenne ».

Vaines paroles sur le droit de réglementer

Prenons, par exemple, le droit à règlementer. L’instrument interprétatif commun à Ottawa et à Bruxelles affirme que : « l’AECG préserve la capacité de l’Union européenne et de ses États membres ainsi que du Canada à adopter et à appliquer leurs propres dispositions législatives et réglementaires destinées à réglementer les activités économiques dans l’intérêt public, à réaliser des objectifs légitimes de politique publique tels que la protection et la promotion de la santé publique, des services sociaux, de l’éducation publique, de la sécurité, de l’environnement et de la moralité publique, la protection sociale ou des consommateurs (article 2). »

Jusque là, tout semble aller pour le mieux, mais Scott Sinclair et Stuart Trew, experts canadiens en commerce, affirment : « le point fondamental qui manque à cette déclaration est que, si les parties ont encore le droit de réglementer, elles doivent le faire conformément aux obligations et aux engagements figurant dans le CETA ».

Par exemple, un gouvernement serait donc parfaitement en droit d’adopter une loi dans le cadre du CETA, mais pourrait ensuite être contraint de débourser des milliards en dommages et intérêts, si l’on estimait que cette loi viole les obligations envers les investisseurs étrangers telles que définies dans le CETA[...]

Arnaque n°1 : Le CETA défend les droits des travailleurs

La Commission européenne se félicite des « règles fortes relatives à la protection des droits du travail ». Le CETA n’offre pourtant que peu de protections concrètes dans le domaine du travail. Le chapitre 23, Commerce et travail, déborde de bonnes intentions, « Une Partie n’omet pas... d’appliquer effectivement son droit et ses normes en matière de travail dans le but de stimuler le commerce ou l’investissement. » (article 23.4.3), pour n’en citer qu’une.

Cependant, aucune sanction n’est prévue par le CETA, si des Etats membres de l’Union européenne, le Canada ou des entreprises qui y travaillent violent une telle disposition. A la différence d’autres parties du texte, notamment les droits des investisseurs étrangers, le respect des règles en matière de travail du CETA ne peut pas être imposé par des sanctions commerciales ou encouragé financièrement (articles 23.10 et 23.11.1).

Une violation des droits du travail figurant dans le CETA ne déboucherait que sur un processus non-contraignant de discussions et de recommandations[...]

Le statut inférieur que le CETA accorde aux droits du travail peut être lourd de conséquences. A plusieurs reprises dans le texte, l’accord pourrait mettre à mal des droits pour lesquels les travailleurs et les syndicats ont dû se battre avec acharnement: les règles du CETA relatives aux marchés publics sont susceptibles de provoquer des conflits juridiques, si les pouvoirs publics décident de conditionner leurs achats publics à des critères sociaux tels qu’un salaire minimum ou le respect des conventions collectives[...]

Le CETA risque enfin de mener à des suppressions d’emplois importantes. A en croire une étude menée par la Tufts University en septembre 2016, 230.000 emplois risquent de disparaître. Cela pourrait affecter la hausse des salaires et, d’ici à 2023, les travailleurs subiraient une perte de salaire annuelle en moyenne de 1776 € au Canada et entre 316 € et 1331 € dans l’UE (selon le pays et comparé à un scénario sans CETA). Les chercheurs prédisent aussi une hausse des inégalités, ce qui serait dangereux sur le plan politique, puisque l’application du CETA bénéficieraient essentiellement aux détenteurs de capitaux et non aux travailleurs. De telles projections sont tirées de l’expérience de précédents accords commerciaux comme l’ALENA, l’Accord de libreéchange nord-américain (cf. évaluation36 de la confédération syndicale des Etats-unis AFL-CIO). Loin de protéger les travailleurs, comme le proclament pourtant ses plus fervents partisans, le CETA soutient donc la richesse et le pouvoir d’une infime minorité aux dépens des travailleurs[...]

Arnaque n°2 : Le CETA est un accord qui est bon pour l’environnement

Selon la Commission européenne, le CETA offre « une réglementation forte en matière de protection... de l’environnement »[...]

Cependant, comme dans le cas du chapitre sur le travail, une violation des dispositions du CETA en matière d’environnement ne peut pas être punie par des sanctions commerciales ou des pénalités financières. Les victimes d’atteintes à l’environnement ne peuvent pas avoir recours à la justice. Le CETA ne prévoit pas non plus de dispositions autorisant des politiques environnementales et climatiques, dont nous avons pourtant un besoin urgent, à passer au-dessus ou encore être exclues des règles du CETA qui peuvent les compromettre.

Dans le CETA, figurent de nombreuses règles qui compliqueront la lutte contre le changement climatique et la protection de l’environnement :

Le texte du CETA ne mentionne pas le principe de précaution mais fait référence à la démarche contraire, des approches « fondées scientifiquement », en vertu desquelles un risque doit être prouvé sans le moindre doute avant qu’un produit ne soit interdit (articles 24.11.2c et 25.2.2b)[...]

Arnaque n°4 : Le CETA protège les services publics comme la santé et l’eau

[...]La menace la plus importante pesant sur ces services vient des droits très étendus des investisseurs étrangers, visés au chapitre huit du CETA[...]

La réglementation des secteurs du service public les plus sensibles tels que l’éducation, l’eau, la santé, la sécurité sociale et les retraites se trouve potentiellement menacée par toutes sortes de plaintes coûteuses que pourraient déposer les investisseurs[...]

Arnaque n°6 : Le CETA respectera les normes protégeant les personnes et l’environnement

Selon Cecilia Malmström, Commissaire européenne au Commerce, le CETA va « respecter totalement les normes ».72 Sur son site, la Commission va même jusqu’à proclamer que « les normes et réglementations concernant la sécurité alimentaire, la sécurité des produits, la protection des consommateurs, la santé, l’environnement, les normes dans le domaine social et du travail, etc. resteront inchangées. » (ce mot a été souligné par nos soins).

Pourtant, plusieurs chapitres du CETA contredisent directement ces belles paroles, qui n’ont d’autre but que d’être rassurantes.

Le chapitre 12 sur la réglementation intérieure engage le Canada, l’UE et ses Etats membres, ainsi que les pouvoirs locaux et régionaux, à adopter ou à conserver des procédures de licenciement et de qualification qui soient « aussi simples que possibles » pour les entreprises (article 12.3.7), à moins qu’elles ne soient listées dans une annexe complexe.

L’engagement à ce que les procédures de validation d’un réacteur nucléaire, d’un pipeline, d’une usine de transformation des aliments ou d’une banque soient « aussi simples que possibles » ne manquera pas d’impacter les futures normes. A titre d’exemple, des réformes visant à renforcer le contrôle bancaire et la gestion des risques, comme le recommande le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, pourraient être perçues comme une violation du chapitre 12.

Rien dans le texte du CETA ne contrebalance ce critère de simplicité par d’autres valeurs propres à la société, notamment s’assurer que le projet de pipeline ne détruise pas l’environnement ou que les habitants de la zone concernée aient leur mot à dire[...]

Ellen Gould, du Centre canadien de politiques alternatives, a décrit la manière dont le CETA « exercerait une pression colossale sur les gouvernements afin qu’ils ne prennent jamais... d’initiatives importantes ».

En se référant à l’interdiction de l’amiante faite par la France en 1997, matière dangereuse s’il en est, elle écrit :

« Si le CETA avait déjà été en vigueur, le Canada et son industrie de l’amiante auraient disposé d’outils très puissants leur permettant d’empêcher que l’interdiction française ne voie le jour.

L’industrie de l’amiante aurait pu menacer de déposer une plainte contre cet Etat dans le cadre du CETA et de réclamer des milliards en guise d’indemnité ; les entreprises du secteur de l’amiante auraient pu contrer l’interdiction, arguant qu’elle n’avait pas été établie avant l’obtention de leurs licences ; ... grâce aux dispositions du CETA en matière de coopération, le Canada aurait été en mesure d’attaquer l’interdiction dans le cadre de réunions à huis-clos, bien avant que les citoyens français n’aient été avertis que cette action était envisagée.

Enfin, si tous ces efforts avaient échoué, le Canada, partie du traité CETA, aurait pu demander un moratoire sur l’entrée en vigueur de l’interdiction, ce qui aurait donné plus de temps au lobby de l’amiante pour qu’il organise sa riposte. »[...]

Une très bonne donne pour les entreprises

La Commission européenne et le gouvernement canadien qualifient le CETA de « l’accord de libre échange le plus prometteur que le Canada ou l’UE n’ait jamais négocié ». La Commission européenne, par son président, Jean-Claude Juncker, en a fait « notre meilleur accord commercial et le plus progressiste ».

Rien ne saurait être plus éloigné de la vérité.

Le CETA se résume à établir une longue liste de ce que les gouvernements et les parlements n’ont plus le droit de faire. Si, par exemple, ils veulent lutter contre le changement climatique ou contre les inégalités sociales, ou s’ils veulent encore règlementer le secteur bancaire ou faire marche arrière en cas d’échec de privatisations, ou bien s’attaquer à tout autre problème urgent de notre époque. Dans les faits, le CETA aggravera nombre de ces problèmes. Le CETA peut aussi condamner les gouvernements à payer lorsqu’ils optent pour des politiques environnementales et des politiques favorables aux citoyens, choix pour lesquels ils les ont élus.

Une route parsemée d’embûches pour le CETA

Pour finir sur une note positive, nous pouvons nous attendre à ce que beaucoup d’autres personnes s’intéressent de près à ce que le CETA réserve aux Etats membres de l’UE et à leurs citoyens. Le CETA devra être ratifié par tous les Etats membres de l’UE. Même s’il était examiné au Parlement européen au début de 2017, en l’état, l’accord devrait encore passer par les parlements nationaux des 28 Etats membres de l’UE avant d’entrer en vigueur. Il reste donc de nombreuses occasions de dénoncer l’énorme arnaque du CETA et de tenter de renverser cet accord[...]

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Pour d'autres analyses sur le CETA, voir le site du mpOC-Liège, la rubrique CETA : http://liege.decroissance.be/#CETA

Vous noterez en particulier l'intéressant article de Raoul Marc Jennar publié dans le Monde diplomatique de janvier 2017 : La résistance wallonne, bluff ou brèche ?. Raoul Marc Jennar, qu'on a cependant connu plus direct et corrosif, a sans doute dû s'adapter au modus operandi du Monde diplomatique (à ce sujet, lire le tout aussi intéressant article de Guillaume de Rouville, Le Monde Diplomatique en dépôt de bilan).

Obsolescence (Serge Latouche)

Vous disposez de 40 minutes ? Écoutez cet excellent documentaire audio de Paola Stévenne, Croissance et obsolescence, diffusé sur la RTBF dans l'émission Par Ouï-dire de Pascale Tison le 29 septembre 2016. Avec dans le rôle principal, Serge Latouche (objecteur de croissance, professeur émérite de la faculté de droit, économie et gestion Jean Monnet de l'université de Paris-XI). 

 

Pour le mpOC-Liège,
Francis Leboutte

Mouvement politique des objecteurs de croissance, groupe de Liège
Tél : 04 277 91 42
Courriel : info @ liege.mpOC.be
Site : liege.decroissance.be

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